« Mon travail, c’est de protéger ceux qui nous protègent » Gérald Darmanin.
La loi «Sécurité globale» concerne l’articulation de l’action des acteurs des forces de l’ordre. Elle vise notamment au renforcement des prérogatives de police nationale, des agents de sécurité privés collaborant avec l’État ainsi que ceux de la SNCF et la RATP. Elle porte également sur les outils de surveillance et la pénalisation de la diffusion malveillante des images des forces de l’ordre.
● L’élargissement des pouvoirs des polices municipales
La loi prévoit, dans le cadre d’une expérimentation d’une durée de 3 ans, de conférer aux polices municipales composées de plus de vingt agents et d’un chef de service, d’être dotées de pouvoirs de police judiciaire et de maintien de l’ordre. Ce dispositif aura pour conséquence d’élargir le champ de compétence des policiers municipaux. Ils pourront par exemple intervenir dans le cadre de manifestations notamment. La Ville de Paris est notamment concernée par ce dispositif mais refuse d’armer ses futurs agents.
● Le cadre des vidéo-surveillances.
Il est prévu dans ce contexte un élargissement de l’accès aux vidéosurveillances. La police municipale pourra notamment avoir accès aux images aux abords des commerces ou aux abords des halls d’immeubles par exemple. De plus, l’usage des drones est voué à être élargi principalement au cas de sécurisation de rassemblements de personnes. Pour finir, les caméras piétons pourront être visionnées en direct depuis le poste de commandement de la police lorsque la sécurité des forces de l’ordre, des biens et des personnes est menacée ou bien «dans le cadre d’une procédure judiciaire ou d’une intervention ».
● La fin de la réduction des peines pour les auteurs de violences contre les forces de l’ordre.
L’article 23 de la loi supprime les réductions de peine automatiques des personnes s‘étant rendues responsables de violence sur les forces de l’ordre, mais également sur les personnes investies d’un mandat électif public ou d’un sapeur-pompier professionnel ou volontaire. Les réductions de peine pour bonne conduite restent néanmoins possibles.
● L’autorisation du port d’armes au sein d’établissements publics pour les agents de police.
Ce dispositif est très controversé car il laisse entendre, certes une sécurité renforcée mais également un libre accès à de potentiels dérapages. Les partisans de cette autorisation illustrent leur propos par l’évocation des attentats terroristes survenus au Bataclan. Trois policiers avaient été dans la salle et s’ils avaient eu la possibilité d’avoir leurs armes sur eux, la sécurité des spectateurs aurait potentiellement pu être assurée selon eux. Néanmoins, cela est à mettre en balance avec les risques de panique générale notamment relevés par les opposants à cette idée.
● L’article 24 : controverse et diffusion d’images des forces de l’ordre.
L’article prévoit la modification de la loi de 1881 sur la liberté de la presse. Il vise la sanction des diffusions d’éléments d’identification d’un agent de police ou de gendarmerie national agissant dans le cadre d’une opération de police. Cette diffusion sera sanctionnée lorsqu’elle sera faite dans le but de porter atteinte à son intégrité qu’elle soit physique ou morale. Cet article trouve son origine dans les demandes des syndicats de police qui, dans un souci de protection de la personne des forces de l’ordre, ont alerté sur les menaces à l’encontre de policiers en raison de leurs activités.
Cet article pose néanmoins problème. Tout d’abord, étant donné que les premières lignes de notre système judiciaire sont les agents de police, il reviendra aux principaux intéressés de cet article de juger par eux même si la captation de l’image porte atteinte à leur intégrité. Dans ce cas, les agents occuperaient un rôle de juge dans l’interprétation de la situation et dans la prise de décision concernant la mise en garde à vue. Mais, ils joueraient également un rôle de victime de l’atteinte potentielle à leur intégrité.
L’article vient par ailleurs se heurter à la liberté de la presse et la liberté d’expression. Malgré le fait que les rédacteurs assurent que seules les captations malveillantes sont en cause, et qu’il n’est pas dans l’objectif de l’article d’empêcher les journalistes de travailler en portant atteinte au droit d’informer des journalistes ou des citoyens, la notion d’intégrité laisse sous entendre autre chose. Ces derniers temps, plus particulièrement depuis l’affaire George Floyd, le nombre grandissant de publications concernant des arrestations, des interventions brutales et parfois injustifiées de la part des agents de police via les réseaux sociaux, laisse penser que cet article peut être la porte ouverte à la multiplication de ces ingérences. Celles-ci se feraient en toute impunité par certains agents des forces de l’ordre.
Une vague de mécontentement a alors vu le jour au sujet de cet article 24. Cela est illustré par les différentes manifestations qui ont eu lieu dans tout le pays, et notamment la manifestation parisienne, théâtre de violences entre les manifestants et la police sur place.
Devant un nombre toujours plus grandissant de critiques, le Premier ministre a annoncé, le 24 novembre dernier, avoir saisi le Conseil constitutionnel pour cet article. Le 30 novembre, et donc à la suite de cette saisine, il a décidé de mettre en place une commission indépendante visant à réécrire l’article 24 dont l’avenir demeure incertain.
Sources :
https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b3452_proposition-loi
https://www.lemonde.fr « L’article 24 de la future loi “sécurité globale” menace la liberté d’informer, alertent des sociétés de journalistes »
https://www.lefigaro.fr/actualite-france « ce que contient le projet de loi sécurité globale »
https://www.lemonde.fr « Loi de sécurité globale : Dans une République, la sécurité met le citoyen au centre »