La récente politique chinoise en matière de jeux vidéo au travers du retrait de Fortnite du marché local

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Image : Epic Games

 

NOTIONS ESSENTIELLES

Battle Royale : Le terme anglophone battle royale renvoie à un genre de jeux vidéo, souvent des jeux de tir à la première ou à la troisième personne, basé sur la mécanique du last man standing (en français : « dernier homme survivant »).

Fortnite : Fortnite est un jeu en ligne de tir à la 3ème personne, développé par Epic Games sous la forme de différents modes de jeu. Bien que les deux modes de jeu aient été un succès, c’est réellement Fortnite Battle Royale (le mode battle royale du jeu) qui est devenu un phénomène de société.

Epic Games : Epic Games est un studio de développement de jeux vidéo ainsi qu’un distributeur de jeux vidéo.

Tencent : Tencent Holdings Limited est une entreprise créée en 1998. Les services de Tencent incluent notamment des jeux en ligne multijoueur et Tencent propose de nombreux jeux en ligne via son portail de jeux. Tencent est ancré parmi les géants du jeu vidéo notamment car il s’avère être actionnaire majoritaire de Riot Games et Supercell, mais aussi car il est actionnaire à 40 % d’Epic Games

 

« Chers utilisateurs : Le test de “Fortress Night” est arrivé à son terme. Nous allons fermer le serveur dans un avenir proche. […] Merci à tous ceux qui sont montés dans le bus et ont participé au test de “Fortnite” ! » – L’équipe “Fortress Night”

L’annonce est tombée, quelques années après son arrivée en Chine, le jeu vidéo Fortnite, titre phare de l’éditeur Epic Games et véritable phénomène dans le monde du jeu en ligne multijoueur, n’est plus accessible aux joueurs chinois.

Bien que le pays ait, ces dernières années, assoupli ses relations internationale et se soit notamment ouvert aux géants américains du web (Apple, Microsoft, divers jeux, etc.), aujourd’hui de nouvelles frictions font leur apparition et c’est le cas en matière de jeux vidéo. En effet, les autorités et le gouvernement chinois veulent reprendre le contrôle de la question des jeux en ligne car cela constitue, à leurs yeux, une pratique trop risquée.

 

Une version « beta » du jeu disponible depuis 2018

Le studio américain s’était associé en 2018 à Tencent, le géant chinois dans le secteur du jeu vidéo en ligne, afin de pénétrer le marché local qui aurait pu s’avérer être une véritable mine d’or en raison du nombre potentiel d’utilisateurs qu’il compte.

Il est donc possible qu’il ne s’agisse là que d’un choix purement économique. Et si l’on se fie à l’analyse apportée par Daniel Ahmad, cela pourrait bien être le cas. Dans un tweet de l’analyste, on apprend que le jeu n’a en réalité « jamais été lancé officiellement » en Chine. Selon lui, la version chinoise de Fortnite a toujours demeuré au stade de beta ouverte et il précise même que « c’est parce que le jeu n’a jamais été approuvé par le gouvernement et par conséquent ne pouvait pas être officiellement lancé et monétisé ». Cela peut sembler étrange, surtout quand on sait à quel point le marché chinois est familier avec le contenu payant directement en jeu et les microtransactions.

 

Tweet de l’analyste Daniel Ahmad

 

Il semblerait donc qu’on ait décidé d’arrêter les frais du côté d’Epic Games (et de Tencent, qui détient malgré-tout une part importante du groupe).

 

La censure des jeux vidéo, une pratique courante en Chine

En effet, pour pénétrer le marché chinois, les jeux vidéo en provenance de l’étranger doivent subir des modifications particulièrement notables en raison d’obligations règlementaires et « culturelles ».

Dans le cas de « Fortress Night », le jeu était notamment soumis à une interdiction portant sur les microtransactions (c’est-à-dire les achats d’objets, de cosmétiques, d’éléments divers, etc. au sein du jeu).

« Many modern video games are not on a “blacklist” so to speak, but lengthy checks from the regulators mean that many overseas games are left waiting in a years-long queue to be authorised. » – Kerry Allen, China media analyst pour la BBC

Les autorités de régulation chinoises sont très strictes, elles fixent des conditions également très strictes et choisissent de retirer les jeux jugés trop violents, pornographiques et évidemment tous ceux qui présentant le pays sous un jour négatif.

 

Le positionnement particulier de la chine en matière de régulation des jeux vidéo

On remarque un comportement plutôt décourageant de la part de la chine en matière de jeux vidéo. Cela s’illustre notamment par les procédures complexes pour voir son jeu reconnu et lancé sur le marché chinois en tant que compagnies étrangère.

« First, games companies have to secure contracts with local Chinese firms to get their games recognised. Then they are launched on to standalone Chinese servers. » – Kerry Allen, China media analyst pour la BBC

On comprend ainsi que même après l’accès au marché, les jeux ne sont disponibles que dans une version unique et autonome sur des serveurs chinois. Et cela implique évidemment que les joueurs connectés sur les serveurs disponibles en Chine ne peuvent pas entrer en contact, donc jouer, avec des joueurs à l’international.

« This means that mainland-based users can play with each other, but they can’t interact with international players. » – Kerry Allen, China media analyst pour la BBC

 

Une loi à destination des mineurs pour limiter le temps de jeu quotidien

Cette volonté dissuasive de la part de l’autorité chinoise ne concerne pas uniquement les compagnies du milieu du jeu vidéo, mais aussi les utilisateurs. En effet, à la fin du mois d’août dernier, le régulateur chinois de l’audiovisuel, de l’édition et de la radiodiffusion avait annoncé qu’il allait imposer aux mineurs des restrictions quant au temps passé sur les jeux vidéo en ligne (cela ne s’applique visiblement qu’aux jeux vidéo strictement en ligne, pas à ceux qui ne nécessitent aucun accès à internet).

Les jeunes chinois de moins de 18 ans ne pourront ainsi jouer que les vendredis, les week-ends et durant les vacances. Les jeux vidéo en ligne leur seront purement et simplement inaccessibles les autres jours. Et pour empêcher tout contournement de cette interdiction, les mineurs devront suivre un processus de connexion avec authentification préalable au moyen de leur pièce d’identité. Un système de reconnaissance faciale a même été évoqué parmi les solutions envisageables.

Une manœuvre pour le gouvernement chinois qui espère voir émerger une « énergie positive » chez les jeunes, là où les jeux vidéo sont qualifiés d’« opium spirituel » de la jeunesse et où le capital (en référence à la marchandisation et aux microtransactions) est considéré comme ne faisant pas partie des « valeurs correctes ».

 

Sources :