Par Matteo ANTONI, étudiant du Master 2 Droit des médias électroniques
Les plateformes numériques, en particulier aujourd’hui les réseaux sociaux, sont sources de polémiques tant ils donnent lieu à la propagation de contenus pouvant être qualifiés de cyberharcèlement. Selon l’article 222-33-2-2 du Code pénal, le harcèlement moral est défini comme « le fait de harceler une personne par des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale », et le cyberharcèlement en est une circonstance aggravante.
Le problème est que ces contenus touchent également les plus jeunes.
En effet d’après une enquête de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (dite CNIL) de 2021, c’est autour de l’âge de 8 ans que les enfants effectuent leur première inscription et plus de la moitié des mineurs âgés de 10 à 14 ans seraient présents sur ces plateformes.
Pour lutter contre ce fléau, un projet de loi a été déposé au parlement le 17 janvier 2023, visant a lutter contre la haine en ligne. Le texte a été finalement été promulgué le 7 juillet 2023, donnant lieu à l’adoption de la Loi Majorité numérique publiée au Journal officiel du 8 juillet 2023.
Les apports de la loi du 7 juillet 2023
Premièrement, la loi vient ajouter un nouvel alinéa au IV de l’article 1er de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (dite LCEN) visant a définir les réseaux sociaux en ligne comme « toute plateforme permettant aux utilisateurs finaux de se connecter et de communiquer entre eux, de partager des contenus et de découvrir d’autres utilisateurs et d’autres contenus, sur plusieurs appareils, en particulier au moyen de conversations en ligne, de publications, de vidéos et de recommandations. »
La loi va également permettre l’instauration d’une majorité numérique à l’âge de 15 ans afin de protéger l’enfant face à la prise d’ampleur des réseaux sociaux. Ainsi de nouvelles obligations incombent aux réseaux sociaux tels que :
- Le devoir d’information envers les parents et l’enfant de moins de 15 ans sur “les risques liés aux usages numériques et les moyens de prévention” mais également sur les conditions d’utilisation de leurs données personnelles ;
- Ainsi que de refuser l’inscription à leurs services des enfants de moins de 15 ans, sauf accord préalable d’au moins d’un des parents
- permettre aux parents, ou à l’un des deux, de demander la suspension du compte de leur enfant de moins de 15 ans ;
- Mise en place d’un dispositif de contrôle du temps passé en ligne qui devant être notifiée mineur en question.
Ces obligations valent aussi pour les comptes déjà créés par des enfants de moins de 15 ans, les plateformes ayant deux ans pour récolter l’accord des parents.
Toutes ces obligations doivent être le résultat d’un procédé technique conforme à un référentiel mis en place par l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (dit ARCOM), après consultation de la CNIL.
Un délai minimum d’un an a alors été fixé pour l’application du dispositif. En cas de non-respect de cette obligation, « le réseau social pourra se voir infliger une amende pouvant aller jusqu’à 1% de son chiffre d’affaires mondial ».
D’autre part, la loi vient renforcer le contrôle et la poursuite du cyberharcèlement en ce qu’elle impose :
• La diffusion de messages de prévention afin de lutter contre le cyberharcèlement auprès des utilisateurs
• La possibilité aux utilisateurs de signaler d’avantage de contenus illicites afin qu’ils soient retirés. En addition de l’apologie d’actes terroristes, de l’incitation à la haine, des faits de harcèlements sexuel et scolaire, sont aussi ainsi concernés les faits de harcèlement conjugal ou moral, de chantage, d’atteinte à la vie privée et d’atteinte à la représentation de la personne.
Pour terminer, la loi prévoit que le gouvernement doit dans un délai d’un an faire parvenir au Parlement un rapport complet sur les conséquences de l’utilisation des plateformes en ligne sur la santé physique et mentale des jeunes et de leur développement.
Affaire a suivre…
Sources :
• Code pénal: https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000037289658/
• Loi n° 2023-566 du 7 juillet 2023: https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000047799533
• Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique
• ≪ Les comportements digitaux des enfants: Regards croisés parents et enfants ≫: Sondage Ifop pour la CNIL
• https://www.vie-publique.fr/loi/288274-majorite-numerique-15-ans-reseaux-sociaux-loi-7-juillet-2023