par Yanis IDRI, étudiant du Master 2 Droit des médias électroniques
Starbucks fait l’objet d’une attention accrue de la part de la Washington Consumer Protection Coalition, qui l’accuse d’avoir utilisé des pratiques trompeuses à travers son application mobile. L’association de défense des consommateurs affirme que la société aurait délibérément induit ses clients en erreur, ce qui aurait entraîné un excédent financier considérable de 900 millions de dollars.
Les accusations portées pourraient s’apparenter à l’utilisation de ce que l’on qualifie de “dark patterns”. Ces méthodes controversées ont récemment suscité l’attention des autorités de régulation, notamment la FTC aux États-Unis et plus récemment la DGCCRF en France qui a mis en ligne sur son site une fiche pratique à l’attention des consommateurs « Pièges sur les sites de commerce en ligne : attention aux dark patterns ! | economie.gouv.fr ».
Que sont les « Dark Patterns » ?
Les « Dark Patterns » (schémas obscurs) font référence à des conceptions d’interfaces utilisateur intentionnellement élaborées pour tromper, manipuler ou influencer les choix des utilisateurs d’une manière qui va souvent à l’encontre de leurs intérêts. Ces pratiques sont couramment utilisées dans les interfaces en ligne, telles que les sites web, les applications mobiles et les plateformes numériques, pour inciter les utilisateurs à prendre des décisions qu’ils ne prendraient pas nécessairement s’ils étaient pleinement informés ou s’ils avaient une compréhension claire des conséquences.
Pratiques suspectes chez Starbucks : Les Dark Patterns sous les feux des projecteurs
Dans l’affaire impliquant Starbucks, les “dark patterns” sont mis en lumière en raison de deux pratiques spécifiques soulevées par l’association de protection des consommateurs.
Premièrement, l’entreprise incite les clients à recharger leur compte avec un montant minimum de 10 dollars, mais elle impose un plancher de recharge minimal de 15 dollars et propose par défaut une recharge de 25 dollars. Cette stratégie vraisemblablement déloyale ou trompeuse viser à pousser les utilisateurs à dépenser davantage.
Deuxièmement, le solde restant est inutilisable lorsqu’il est inférieur au prix d’une consommation car le client ne peut combiner ce moyen de paiement avec un autre. De plus Starbucks limite les pourboires réalisables depuis l’application, ce qui conduit de nombreux clients à laisser involontairement des montants non réclamés sur leur compte au profit de l’enseigne.
Si ces pratiques étaient confirmées, elles auraient permis à Starbucks de générer un montant considérable de 900 millions de dollars au cours des cinq dernières années. Les autorités de régulation américaines pourraient donc enquêter sur la manière dont Starbucks a conçu ces stratégies pour influencer le comportement des utilisateurs de son application, et déterminer si elles relèvent véritablement de l’utilisation de “dark patterns”.
Que prévoit le droit français ?
D’un point de vue légal, ces allégations pourraient être considérées comme relevant des pratiques commerciales trompeuses telles que définies par les articles L.121-1 et suivants du code de la consommation.
Les pratiques commerciales déloyales sont sujettes à des sanctions :
- Une amende pouvant s’élever jusqu’à 300 000 euros et deux ans d’emprisonnement pour une personne physique ;
- Jusqu’à 1,5 million d’euros pour une personne morale ;
- Le montant de l’amende peut être augmenté de manière proportionnée aux avantages obtenus par l’infraction, jusqu’à 10 % du chiffre d’affaires moyen annuel.
En somme, les révélations sur les pratiques commerciales trompeuses et l’utilisation de “dark patterns” soulignent l’importance cruciale de protéger les droits des consommateurs. Les lois existantes et les nouveaux textes comme le Digital Services Act et le Digital Market Act sont des outils essentiels pour assurer la transparence et la loyauté dans le commerce en ligne. En prenant des mesures fermes et en appliquant des sanctions appropriées, les autorités peuvent dissuader les entreprises de recourir à des pratiques déloyales, contribuant ainsi à un environnement numérique plus juste et plus éthique.
Sources
Pièges sur les sites de commerce en ligne : attention aux dark patterns ! | economie.gouv.fr
Article L121-1 – Code de la consommation – Légifrance (legifrance.gouv.fr)
Starbucks accusé de tromperies et de Dark Patterns pour 900 millions $ (haas-avocats.com)