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L'APPEL À L'AIDE DES CHAUFFEURS VTC, LA NÉCÉSSAIRE CLARIFICATION DE LEUR STATUT JURIDIQUE

Publié par Lauren Stieglitz le 2 février 2017 dans Internet / Numérique : Actualités | Consulté 76 Fois

Le 16 janvier 2017, les chauffeurs de voitures de transport privés (VTC) ont manifesté pour peser sur les discussions en cours entre le médiateur du Gouvernement et les plateformes numériques de réservation. En décembre déjà, ils dénonçaient l’appauvrissement de leurs conditions de travail et visaient principalement Uber. Aujourd’hui, c’est non seulement l’augmentation fin 2016 de la commission prise par le géant du transport, qui passe de 20 à 25% qui est ciblée, mais surtout la transition du monde du travail vers le numérique. Il s’agissait d’interpeller les candidats à la présidentielle sur cette mutation de la société, qui génère, selon les syndicats, des travailleurs pauvres. Les syndicats représentatifs appelaient ainsi à une « déconnexion massive des chauffeurs ».

La redondante question de la nature du statut social et juridique des chauffeurs VTC

Les chauffeurs et syndicats réclament un droit de vivre « dignement ». Pour cela, ils estiment qu’une augmentation du tarif de la course de six euros actuellement à huit euros conviendrait et permettrait de vivre dans des conditions plus acceptables.
Certains dénoncent en outre le flou juridique autour de leur statut et réclament l’adoption d’un cadre réglementaire minimal. En effet, ces plateformes se cachent derrière la notion de « plateformes collaboratives » pour qualifier les chauffeurs qui fournissent la prestation de services d’indépendants. Le fonctionnement d’Uber, Allocab ou encore Heetch, repose sur le contrat de courtage. Ainsi, la plateforme BtoC (Business to Consumer) est un intermédiaire qui se contente de rapprocher les parties. Elle embauche des prestataires « indépendants » théoriquement autonomes, dont elle est le commissionnaire. Elle achète des prestations à un chauffeur et les revend à un client. Pourtant, certaines plateformes auraient plus intérêt à embaucher leurs prestataires de services comme salariés. Un salarié met en effet durablement ses compétences à l’œuvre, s’investit dans la durée et dans la qualité, qualité de plus en plus essentielle dans un marché concurrentiel.

Un indépendant désigne un entrepreneur individuel gérant une entreprise en nom propre sans personnalité morale, et les gérants majoritaires de société anonyme à responsabilité limitée (SARL). Il n’est dès lors subordonné à personne. Pourtant, il s’est avéré que la majorité des chauffeurs qui travaillent pour les plateformes numériques de transport, et particulièrement pour Uber, ne sont pas réellement indépendants, mais se trouvent plutôt dans une relation salariale. Un contrat de travail peut se définir, selon la jurisprudence, comme étant une convention par laquelle une personne s’engage à travailler pour le compte d’une autre et sous sa subordination, moyennant une rémunération. Selon l’arrêt de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence du 26 juin 2015 (n°12/20059), ce lien de subordination est « l’élément déterminant du contrat de travail, puisqu’il s’agit là du seul critère permettant de le différencier d’autres contrats comportant l’exécution d’une prestation rémunérée. Il est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ». Ce lien, caractérisé par le contrat de travail, différencie  fondamentalement un indépendant d’un salarié.
Or en l’espèce, les chauffeurs VTC sont formés par Uber, qui fixe le pourcentage de la commission et donne des instructions sur la course à effectuer. Les chauffeurs doivent en outre rendre des comptes au commissionnaire. Or, plus il y a de contraintes, plus le lien de subordination est fort et plus l’existence d’une relation d’employeur à salarié est avérée. La Cour de cassation, le 7 juillet 2016 (Cass. 2e civ., 7 juill. 2016, n°15-16110,), a posé les conditions auxquelles la requalification en contrat de travail était encourue. Les chauffeurs VTC doivent être dans la capacité de démontrer qu’ils fournissent directement, ou par personne interposée, des prestations au donneur d’ordre dans une situation qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard de celui-ci. Selon le professeur Grégoire Loiseau, la Cour a retenu une définition large de la notion de permanence, et écarte la requalification en contrat de travail lorsqu’un auto-entrepreneur n’est pas à la disposition permanente du donneur d’ordre et reste libre d’effectuer les courses proposées par ce dernier, voire de travailler avec d’autres donneurs d’ordre s’il le souhaite, et exécute ses prestations suivant les horaires qu’il a lui-même fixés.

Indépendants sur le papier, quel statut social leur appliquer ?

La « permanence » des relations des chauffeurs VTC avec un donneur d’ordre est donc primordiale pour faire basculer un travailleur « para-subordonné » vers la « subordination ». En effet, tandis que certains de ces travailleurs n’ont recours à ce type d’activité qu’à titre secondaire pour compléter leurs revenus tirés d’une activité principale, d’autres y trouvent la seule issue pour se doter d’un emploi. On assiste à un détournement de la relation salariale puisque les salariés sont poussés à devenir auto-entrepreneurs et indépendants. De prime abord, cette nouvelle forme de travail apparaissait comme la solution à la crise d’accès au marché du travail salarié. Mais le risque est une accumulation de « petits boulots ».

Le rapport de l’IGAS sur les plateformes collaboratives, l’emploi et la protection sociale de mai 2016 insiste sur le fait qu’en France, les plateformes font très souvent appel à des prestataires salariés qui sont employés par une autre entreprise ou un particulier distinct de la plateforme. Le statut de salarié est donc plus répandu qu’il n’y parait et c’est même le cas d’Uber selon le rapport.
En pratique, ce n’est pas tant cette relation contractuelle qui pose des difficultés, mais c’est celle des « faux indépendants », dont  les conditions de travail et l’organisation de l’activité sont en partie contraintes par un donneur d’ordre.
La plupart des auto-entrepreneurs auxquels la plateforme a recours ne disposent d’aucune clientèle propre, ni fonds de commerce et le service n’est produit que si la technologie (la géolocalisation pour les chauffeurs) de la plateforme est utilisée. De même, dans le cas d’Uber, le tarif est imposé au chauffeur et peut varier à tout moment, dès lors il est dans l’incapacité de prévoir son chiffre d’affaire. C’est d’ailleurs ce qui avait provoqué de vives contestations en 2015. Bien que peu d’entre eux ne soient encore « économiquement dépendants » de l’intermédiaire selon le rapport de l’IGAS, les prestataires de services, tels que les chauffeurs VTC, connaissent une forme de régression de leurs conditions de travail. Alors que l’économie collaborative se veut plus proche des individus, à leur écoute, le travail n’est pas rémunéré à hauteur du service rendu selon le Professeur Philippe Moari, professeur d’économie à l’Université Paris-Diderot. L’acte est dévalorisé et l’aspect  transversal et « collaboratif » disparait. À défaut d’être salariés, la définition d’un véritable statut de ces travailleurs ne semble cependant pouvoir être influencée que par des réclamations d’actions de masses et des URSAFF.

D’ailleurs, l’URSAFF d’île de France a engagé une procédure en février 2016 contre Uber pour faire reconnaitre aux chauffeurs le statut de salariés. Elle s’appuie sur l’existence du fameux « lien de subordination » qui existerait entre la société des véhicules de transport et ses chauffeurs. Elle réclame les cotisations correspondantes au statut de salarié, alléguant que la prestation est fournie dans le cadre d’un service organisé par Uber pour le compte de l’ensemble des chauffeurs. Pour sa défense Uber argue de la flexibilité des chauffeurs et du coût modéré des courses. Cela prouve, selon lui, qu’ils sont dans la capacité d’organiser leur temps de travail, les courses effectuées. Dès lors, ils sont autonomes et ne suivent pas les directives d’Uber. La procédure est en cours devant le tribunal des affaires de la sécurité sociale et n’aboutira pas avant quelques années si l’affaire va jusqu’en cassation. Quand bien même aux Etats-Unis, il est arrivé qu’un chauffeur VTC qui se trouvait dans une situation intermédiaire entre le salariat et l’activité indépendante, dans la « zone grise », voit son contrat requalifié en contrat de travail (Commission du travail de Californie, 16 juin 2015), si l’on s’en tient à l’arrêt de la Cour de cassation du 7 juillet 2016, faibles sont les chances de voir l’URSAFF obtenir gain de cause.

La création d’un statut hybride, nécessaire ?

L’avenir résiderait t-il donc dans la création d’un statut hybride ? C’est ce qui a été recommandé par le rapport de P-H Antonmattei et J.C Sciberras sur le travail économiquement dépendant de 2008. Certains Etats tels que l’Allemagne ou l’Espagne ont déjà adopté des mesures législatives pour encadrer et protéger les travailleurs indépendants vulnérables. Toutefois, selon le Conseil d’orientation pour l’emploi, la situation actuelle des travailleurs indépendants collaboratifs ne justifie pas qu’un statut propre soit créé. Ils seraient en effet trop peu nombreux et les employeurs pourraient en profiter pour faire basculer leurs salariés vers ce régime. Cela contribuerait à diminuer encore l’accès à un emploi stable et protégé, déjà en sursis.
Mais il n’empêche que l’élaboration d’une protection minimale ou l’extension de règles propres au régime salarial aux travailleurs indépendants recourant à une plateforme est nécessaire. Selon le professeur Loiseau, « ils doivent pouvoir être traités, pour la reconnaissance de certains droits sociaux, comme toute espèce de travailleur ».
Une première ébauche a même été réalisée dans la loi travail du 8 août 2016 en son article 60 « relatif aux plateformes de mise en relation par voie électronique », inscrit aux articles L7341-1 et L7342-1 et suivants du code du travail. Ainsi, par exemple, un accès à la formation professionnelle  et aux cotisations sociales leur a été ouvert. Mais cette modification du code du travail n’a pas été jugée suffisante par les syndicats des chauffeurs VTC, qui réclament principalement une meilleure rémunération et de meilleures conditions de travail.

Les abus d’Uber n’ont pas que des effets pervers. En effet, le 14 janvier 2017, l’association de TVC Alternative Mobilité Transport (AMT) a entendu répondre aux attentes et exigences des chauffeurs VTC et a annoncé la création d’une nouvelle plateforme entièrement collaborative. L’association a pour ambition de supprimer l’intermédiaire et donc la commission prélevée sur les courses réalisées. La totalité du chiffre d’affaire sera ainsi reversée aux chauffeurs ce qui contribuera, selon eux, à augmenter leurs revenus et à améliorer leurs conditions de travail. Un système de financement spécifique et différent de ce qui a été connu jusqu’alors dans le secteur du transport privé sera mis en œuvre : la publicité, un abonnement mensuel et l’achat groupé serviront au financement. Cette nouvelle application permettrait de revenir à la notion même d’ « économie collaborative » en tant que mode de consommation, production et financement différent, moins « capitalistes » et d’assurer aux chauffeurs VTC une autonomie et de meilleures conditions de travail. Le tout étant de pouvoir attirer autant de clients qu’Uber. Affaire à suivre.

SOURCES :

REES (M.), « Les chauffeurs VTC manifestent pour « vivre dignement » », nextinpact.fr, publié le 16 janvier 2017, consulté le 18 janvier 2017, https://www.nextinpact.com/news/102890-les-chauffeurs-vtc-manifestent-aujourd-hui-a-paris-pour-vivre-dignement.htm.

AMAR (N.) et VIOSSAT (L.-C), « Les plateformes collaboratives, l’emploi et la protection sociale », igas.gouv.fr, rapport publié en mai 2016, consulté le 28 janvier 2017, http://www.igas.gouv.fr/IMG/pdf/2015-121R.pdf.

ANONYME, « L’ubérisation de l’économie… et la sécurité juridique en question ! », Conférence, 15 novembre 2016, Marseille Maison de l’Avocat.

VAN DE CASTEELE (M.), « VTC : quel modèle pour la plateforme collaborative qui veut contrer Uber ? », latribune.fr, publié le 16 janvier 2017, consulté le 18 janvier 2017, http://www.latribune.fr/entreprises-finance/services/transport-logistique/comment-une-appli-100-collaborative-veut-se-passer-d-uber-630551.html.

CHAUCHARD (J.-P.), « Qu’est-ce qu’un travailleurs indépendant ? », dalloz.fr, Droit social, p. 947, publié le 14 novembre 2016, consulté le 22 janvier 2017.

LOISEAU (G.), « Auto-entrepreneuriat et salariat : le risque de requalification », dalloz.fr, Revue des contrats, n°04, p. 730, publié le 1er décembre 2016, consulté le 28 janvier 2017.

Publié dans Internet / Numérique : Actualités | Tag(s) : contrat de travail, Plateformes numériques, statut juridique, travailleur indépendant, Uber, ubérisation

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