Dans le sillage des succès électoraux du Piratpartiet, le Parti pirate suédois qui siège depuis 2009 au Parlement européen, la mouvance gagne du terrain sur le Vieux Continent. En Allemagne comme en Autriche, des performances encourageantes ont été enregistrées lors de scrutins locaux. De quoi galvaniser les troupes à l’approche des élections européennes.
« Les pirates sont arrivés pour rester »
La Sarre. Son million d’habitants, son industrie minière et son nouveau Parlement. Le Piraten Partei y a fait son entrée le mois dernier, rassemblant sous sa bannière 7.4% des voix. Devenu la quatrième force politique de ce Land, loin derrière le trio CDU-SPD-Die Linke, le Parti pirate allemand devance des formations telles Die Grünen et le FDP. Ce succès a surpris les observateurs car il démontre que les propositions du PIRATEN sont en capacité de toucher différentes franges du corps électoral.
Les pirates s’étaient déjà illustrés en 2011 à Berlin dans des élections équivalentes. Après dépouillement des bulletins, ils envoyèrent quinze représentants au Landtag grâce à un score de 9%. Portée par un électorat urbain et majoritairement jeune, cette percée restait cependant confidentielle. La victoire en Sarre, région moins citadine et peuplée, indique que le Parti peut séduire au-delà des grandes villes. En insistant d’abord sur les enjeux de la vie locale (amélioration des transports, réduction de la dette…) et ensuite sur les défis du monde connecté (légalisation du partage d’œuvres sur l’internet, défense des libertés numériques…), le programme a attiré, entre autres, celles et ceux qui d’habitude s’abstiennent. L’espoir en une démocratie plus poussée a su fédérer.
La dynamique observée outre-Rhin depuis trois ans a des chances de se poursuivre. Les électeurs du Slesvig-Holsace et de Rhénanie-du-Nord-Westphalie sont appelés aux urnes au mois de mai. Les entreprises de sondage attribuent au Piraten Partei 6 et 7% des intentions de vote dans ces territoires respectifs. Soit davantage que le minimum requis pour intégrer le Parlement, fixé à 5% des suffrages exprimés. Dans l’hypothèse où les enquêtes d’opinion se vérifieraient, les pirates allemands vogueraient présentement vers deux nouvelles conquêtes.
L’exemple des Verts
Il est un peu prématuré de qualifier cette tendance de lame de fond. Toutefois, le parcours du PIRATEN rappelle la trajectoire empruntée par les écologistes. Regroupés en un mouvement alternatif au début, ils ont de fil en aiguille bâti un parti aujourd’hui incontournable à l’échelle étatique. Ils étaient jusqu’alors la seule formation atypique crédible sur l’échiquier politique national. Or l’organisation pirate commence à réellement marcher sur ses traces, donc sur ses plates-bandes.
Il n’y a qu’à jeter un œil aux récents sondages s’intéressant aux élections fédérales, qui se tiendront en 2013. Le Parti pirate a bondi aux alentours de 12% alors qu’il stagnait entre 5 et 7% une dizaine de jours auparavant. Son bon résultat en Sarre a créé un second souffle tandis que la méforme des partis traditionnels lui profite à plein. Voilà le parti vert talonné voire carrément dépassé selon les enquêtes. Le pire étant qu’une fraction de son électorat est susceptible de gonfler les rangs de l’adversaire ; le Piraten Partei et Die Grünen ayant des positions identiques sur quelques thématiques. Des rapprochements ont d’ailleurs eu lieu au Parlement européen entre les députés du Parti pirate suédois et le Groupe des Verts/Alliance libre européenne. Une chose est sûre : les rapports de force changent.
Il est vraisemblable que la montée en puissance des pirates se poursuive, en Allemagne et ailleurs. Dans la foulée de son homologue germain, le Parti pirate autrichien s’est lui aussi illustré dernièrement en arrachant un siège au cours d’une élection locale à Innsbruck, la cinquième ville du pays. Malgré sa forme actuelle, le courant ne compte que six années d’ancienneté. Il doit se renforcer afin que les principes et les valeurs qu’il défend trouvent un écho durable auprès des citoyens.
La préparation des futures batailles
Sous la houlette du Parti Pirate International qui tenait mi-avril à Prague son assemblée générale annuelle, dix-neuf formations se sont retrouvées pour notamment débattre de la préparation de la campagne européenne de 2014. Ce rendez-vous doit permettre de frapper un grand coup. Il s’agit de faire mieux qu’en 2009. Décidés à mettre toutes les chances de leur côté, les Partis pirates ont déclaré vouloir avancer sous un drapeau commun en rédigeant un projet unificateur.
Le traité ACTA (Anti-Counterfeiting Trade Agreement) et la transparence démocratique figuraient au menu des discussions. En toute logique, le premier a été ouvertement dénoncé, que ce soit son mode de négociation ou ce qu’il représente ; et la seconde vivement soutenue.
Dans certaines contrées, le Parti pirate est enfin pris au sérieux sur le plan des idées, enfin considéré par le personnel politique et le corps électoral. Il n’est plus un curieux épiphénomène. Débarrassé de cette image, le mouvement doit désormais accroître sa légitimité et sa visibilité. Pour ce faire, il convient d’arrondir les angles tout en conservant un vernis contestataire. Un cap qui pourrait mener les boucaniers vers un horizon où leur pavillon flotterait avec éclat.
SOURCES :
CHAMPEAU Guillaume, Avec 9% des voix, le Parti Pirate allemand débarque au Parlement !, mis en ligne le 19 septembre 2011, consulté le 28 mars 2012, disponible sur http://www.numerama.com/magazine/19850-avec-9-des-voix-le-parti-pirate-allemand-debarque-au-parlement.html
CHAMPEAU Guillaume, Le Parti Pirate enregistre une nouvelle victoire électorale en Allemagne, mis en ligne le 26 mars 2012, consulté le 28 mars 2012, disponible sur http://www.numerama.com/magazine/22135-le-parti-pirate-enregistre-une-nouvelle-victoire-electorale-en-allemagne.html
Ernesto, Pirate Party Enters Berlin Parliament After Historic Election Win, mis en ligne le 19 septembre 2011, consulté le 28 mars 2012, disponible sur http://torrentfreak.com/pirate-party-enters-berlin-parliament-after-historical-election-win-110918/
L. Julien, Le Parti pirate allemand rattrape les Verts dans les sondages, mis en ligne le 03 avril 2012, consulté le 28 avril 2012, disponible sur http://www.numerama.com/magazine/22223-le-parti-pirate-allemand-rattrape-les-verts-dans-les-sondages.html
L. Julien, Le Parti pirate allemand surclasse les Verts dans un sondage, mis en ligne le 11 avril 2012, consulté 28 avril 2012, disponible sur http://www.numerama.com/magazine/22289-le-parti-pirate-allemand-surclasse-les-verts-dans-un-sondage.html
L. Julien, Le Parti pirate enregistre une victoire électorale en Autriche, mis en ligne le 17 avril 2012, consulté le 28 avril 2012, disponible sur http://www.numerama.com/magazine/22335-le-parti-pirate-enregistre-une-victoire-electorale-en-autriche.html
L. Julien, Le Parti Pirate International tiendra son congrès en avril, mis en ligne le 27 mars 2012, consulté le 28 avril 2012, disponible sur http://www.numerama.com/magazine/22151-le-parti-pirate-international-tiendra-son-congres-en-avril.html
REES Marc, Le Parti Pirate allemand décroche 15 sièges au Parlement de Berlin, mis en ligne le 19 septembre 2011, consulté le 18 avril 2012, disponible sur http://www.pcinpact.com/news/65840-parti-pirate-15-sieges-parlement-berlin-election.htm
SANYAS Nil, Le Parti Pirate autrichien glane pour la première fois un siège, mis en ligne le 17 avril 2012, consulté le 18 avril 2012, disponible sur http://www.pcinpact.com/news/70283-parti-pirate-autrichien-victoire-election.htm
SANYAS Nil, Le Parti Pirate gagne des sièges supplémentaires en Allemagne, mis en ligne le 27 mars 2012, consulté le 28 mars 2012, disponible sur http://www.pcinpact.com/news/69808-parti-pirate-allemagne-berlin-sarre.htm