Jeux de cartes, jeux de société … tous ces divertissements familiaux ne cessent de se faire voler la vedette depuis une vingtaine d’années. Jeux vidéo sur consoles ou encore jeux en réseau via nos ordinateurs, tout est bon pour occuper jeunes et moins jeunes. Ces moments récréatifs, devenus individuels, dépassent aujourd’hui le cadre du support physique type DVD-ROM. Désormais, il est possible de s’adonner à son hobby favori grâce au cloud gaming.
Quèsaco ? Sur le même concept que le cloud computing, le cloud gaming est un serveur au sein duquel est rassemblé tout un panel de jeux vidéo, lequel est ensuite proposé aux abonnés ou clients moyennant une contrepartie financière, sans qu’il soit nécessaire pour ces derniers de télécharger l’œuvre. En effet, même si l’on pouvait déjà constater la dématérialisation croissante des bestsellers ludiques par l’achat du simple contenu via l’intermédiaire des services Live des consoles ou des plateformes de vente accessibles sur les PC, la montée en puissance du streaming, induite par l’émergence du cloud gaming, se veut innovante et révolutionnaire.
Il est vrai que les détenteurs de consoles type PlayStation 3 ou Xbox 360, pour ne prendre que ces deux exemples, ne peuvent voir, au premier abord, l’intérêt de cette nouvelle manière de jouer. De surcroît, le catalogue mis à la disposition des gamers abonnés à l’interface Live de leur console est très bien garni. Alors, si ce n’est le choix, quels arguments pourraient les convaincre, eux mais aussi tous les autres, de délaisser la console au profit du cloud ? Deux raisons semblent justifier cet éloignement du support traditionnel en faveur de ce nuage technologique.
En premier lieu, et ce depuis quatre ans, les fournisseurs d’accès à internet se sont lancés dans cette offre de jeux vidéo en streaming. SFR, avec sa NeufBox Evolution, puis Free avec sa FreeBox Revolution, et enfin, dans quelques mois, ce sera Bouygues Telecom avec sa B-Box Sensation. Notre réflexion portera essentiellement sur ce dernier opérateur, son offre étant la plus récente et la plus aboutie. Le 24 janvier dernier, le petit dernier des FAI, comptabilisant un peu moins de 1,2 millions d’abonnés au réseau internet, a dévoilé sa future B-Box, attendue au printemps prochain. En plus d’un design soigné, œuvre de l’entreprise Samsung, ce nouveau boîtier proposera à ses abonnés une interface de jeux en streaming dite de cloud gaming, rendant possible son exercice directement sur le téléviseur, à condition, bien sûr, que ce dernier soit effectivement relié à la box. Ainsi, le streaming n’est plus réservé au seul écran d’ordinateur et naît de sorte sur celui de notre récepteur télévisuel. Plus familier pour une utilisation propre à nos séries ou à nos films favoris, son rôle s’accroît désormais pour offrir une interactivité jusque-là jugée de mauvaise qualité.
Bouygues Telecom n’a pas fait les choses à moitié : il a conclu un partenariat avec l’un des leaders, si ce n’est le plus important, du cloud gaming au monde. Ce partenariat signé avec la société israélienne Playcast Media permettra donc à l’opérateur de lancer son service B-box Games, au sein duquel seront présents les plus adulés des jeux vidéo tel que Call of Duty. L’offre d’un catalogue aussi conséquent que celui que l’on peut trouver sur les interfaces Live des consoles est rendue possible par les nombreux accords passés entre la société Playcast Media et des éditeurs dont la réputation n’est plus à faire, comme Sega, Activision ou encore Warner Bros. Ainsi, Bouygues Telecom sera en mesure de proposer à ses abonnés pléthores de jeux mais surtout les blockbusters de l’année.
De sorte, se profile enfin le premier avantage dont pourront bénéficier les consommateurs : ce catalogue, qui se veut complet selon l’opérateur, sera accessible aux abonnés Triple play moyennant un somme forfaitaire. Elle devrait prendre la forme d’un abonnement soit mensuel soit trimestriel, payé pour un accès global et illimité aux jeux proposés dans le catalogue, sans qu’il soit nécessaire de payer à l’acte. Ceci démontre un avantage pécuniaire considérable comparé à l’achat, seul possible sur les services en ligne des consoles. Néanmoins, ces propos sont à modérer. Si l’annonce faite en cette fin de mois de janvier apparaît comme étant attractive, elle demeure encore assez floue sur certains points, notamment s’agissant du mode de paiement et du montant retenus pour ce service innovant. La seule certitude est le coût supplémentaire qu’il engendrera.
En second lieu, et mise à part cette attraction d’ordre économique, les consommateurs pourraient délaisser la console au profit du cloud gaming au regard de la technique. En effet, le téléchargement ou l’installation d’un jeu supposent la possession d’un matériel perfectionné afin de garantir le bon rendu de la qualité graphique originelle. Cette problématique est largement soulevée pour nos appareils informatiques, lesquels ne sont pas toujours équipés d’une carte graphique ou d’un processeur suffisamment performants. Aussi, le réalisme mis en exergue dans les jeux vidéo actuels impose-t-il le développement de machines de plus en plus abouties mais aussi de plus en plus chères. Au-delà de l’aspect qualitatif requis des périphériques informatiques et des consoles, bien qu’à la pointe de la technologie, est à noter le problème du stockage.
En effet, pour revenir un instant sur le cloud gaming, la transmission étant faite par streaming, soit par flux vidéo relayé du serveur vers le poste récepteur, l’appareil recevant les données n’a pas à les traiter et ne joue que le rôle d’une interface. Ainsi la B-Box Sensation jouera ce rôle de relai pour ensuite permettre la réception sur nos écrans domestiques. A contrario, les consoles traitent les données du jeu vidéo. De surcroît, en plus de leurs capacités graphiques, les consoles disposent quasiment toutes aujourd’hui d’un disque dur afin de stocker les jeux achetés en ligne. Pourtant, malgré la place disponible et l’offre pléthorique de jeux vidéo via le Live, un joueur aguerri pourrait, vu le poids de certains jeux (plus de 10 Go), saturer le stockage et ne plus pouvoir acquérir de contenus dématérialisés. L’on voit ici le second avantage du streaming, lequel peut allègrement faire fi des limites du stockage.
Néanmoins, les problématiques d’ordre technique ne sont pas qu’au seul désavantage de la conception traditionnelle du jeu vidéo. Si conserver est devenu inutile, acheminer le jeu et garantir sa fluidité se trouvent être des inquiétudes mesurées. En effet, le streaming vidéo requiert déjà une bonne qualité de bande passante pour une réception agréable, soit en haut débit (ADSL ou xDSL). S’agissant du jeu vidéo en streaming, son interactivité vient compliquer la donne. Plus que recevoir, l’interface doit être capable de perpétuellement renvoyer les commandes du joueur au serveur pour ensuite relayer la réponse sur nos écrans, et cela dans une fraction de seconde afin de permettre une lisibilité correcte du jeu. Un tel schéma ne peut s’envisager dans le cadre d’une connexion haut débit classique, le très haut débit semble être la seule réponse valable à ce type de performance, avec au moins 10Mbits/s (non partagés), que ce soit par ADSL ou par fibre optique.
Pour conclure, si les FAI se lancent tour à tour dans le cloud gaming, il convient de préciser que les appareils mobiles ne devraient pas tarder à être connectés à ce type de service ; sans parler de l’arrivée prochaine des téléviseurs connectés, tels que la Google TV ou la Smart TV de LG, lesquels ont respectivement, et d’ores et déjà, conclus des partenariats avec OnLive et Gaikai, deux systèmes de cloud gaming.
Sarah AKKAOUI-BORGNA
SOURCES :
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