Dans un communiqué publié par la Commission Européenne, cette dernière entend poursuivre le géant américain dans la lutte contre les abus anticoncurrentiels. Dans un entretien publié au Financial Times, Joaquín Almunia, Commissaire Européen à la concurrence, s’offusque des pratiques mises en place par le moteur de recherche, notamment en Europe, où il gère plus de 90% des recherches. Cette affaire fait suite à l’ouverture de dossiers contre Google par les autorités américaines et européennes (depuis novembre 2010).
Des accusations constituant des atteintes probables à la neutralité du web :
En effet, Google est accusé de rediriger les internautes vers ses propres services, en détournant le trafic internet à son profit, ce qui crée un déséquilibre en faveur du célèbre moteur de recherche, et pénalise d’autres entreprises comme Microsoft, qui proposent eux aussi des solutions de recherche sur le web, ainsi que des services divers.
De ce fait, le géant du web mondial est soupçonné de pratiques visant à déstabiliser la concurrence et d’abus de position dominante.
«Nous poursuivons notre enquête mais ma conviction est qu’ils détournent du trafic », selon Joaquín Almunia. Ils monétisent ce type de service, la position forte qu’ils ont sur le marché général de la recherche et je crains que ce soit non seulement une position dominante mais aussi un abus de cette position dominante.»
M.Almunia précise que la commission européenne attend des propositions concrètes de la part de Google, et envisage des sanctions si ces dernières ne sont pas satisfaisantes, qui pourrait être une amende allant jusqu’à 10% du chiffre d’affaire annuel de Google. Selon les services européens, c’est la façon dont le moteur de recherche présente ses services qui pose problème et non son algorithme, qui reste un secret jalousement gardé, qui plus est protégeable par la propriété industrielle.
Il est intéressant de constater qu’en ouvrant cette enquête, c’est davantage un problème d’abus de position dominante ; en réalité, les actions de Google sont une atteinte à la neutralité du web. En effet, puisqu’internet prend une place de plus en plus importante dans le quotidien des utilisateurs pour trouver des informations, des sites internet comme Google ne sont plus de simples moteurs de recherche, mais s’apparentent même à des éditeurs de service pour lesquels la façon dont les clients trouvent leurs informations influencent leurs méthodes de consommation de produits. Si le géant de la recherche redirige les recherches, cela va forcément réorienter la vision de l’internaute, avec des pénalités à la fois pour l’utilisateur final, car il n’aura pas accès à une navigation internet sans influence. Pour les concurrents de Google, cela va forcément entraîner une pénalisation financière car les recherches seraient redirigées vers Google, qui recevrait une part publicitaire plus importante, et donc augmenterait son chiffre d’affaire de façon illicite.
Un antécédent aux Etats-Unis en faveur de Google avec une solution similaire à la clé dans L’UE :
Comme indiqué précédemment dans une autre note d’actualité, La FTC (Federal Trade Commission) avait commencé ses investigations envers Google dès avril 2011 pour des pratiques similaires, c’est-à-dire la signature d’accords exclusifs dont la finalité était d’empêcher de comparer les moteurs de recherche d’autres concurrents.
En ce qui concerne l’enquête américaine, celle-ci s’est terminée favorablement en faveur de Google. En effet, Google a été blanchi car selon la FTC, il n’y aurait pas assez de preuves en défaveur du moteur de recherche, qui n’a pas été inquiété. Toutefois, Google a dû prendre des engagements afin d’échapper à toute poursuite ultérieure, c’est-à-dire laisser les concurrents accéder à des technologies de réseau mobile pour lequel il dispose de brevets.
En revanche, La Commission Européenne, malgré la solution adoptée Outre-Atlantique, n’a pas retenu cette façon d’agir et a préféré instruire le dossier jusqu’au bout. Alors que l’un des grands concurrents de Google, Microsoft, a été déçu par la façon de juger de la FTC, ce dernier suivra de près le déroulement des activités à Bruxelles. Il est avéré selon M.Almunia que la FTC et la Commission Européenne ont des conclusions similaires vis-à-vis de Google, sauf pour le niveau d’abus de position dominante. Ceci s’explique du fait que Google gère plus de 90% des recherches en Europe, et presque 70% aux Etats-Unis ; la position dominante est donc amoindrie. La Commission apparemment souhaiterait que le litige soit résolu aussi bien à Bruxelles qu’à Washington.
Toutefois, la menace de poursuites de la part de Joaquín Almunia contient un moyen exonératoire : aucune sanction ne sera prise si Google propose de lui-même et d’ici la fin du mois de janvier des solutions satisfaisantes pour rétablir une concurrence loyale sur la toile. Cela est largement à la portée de Google, qui a pris de telles mesures en Amérique. Pourquoi le premier moteur de recherches au niveau mondial ne limiterait-t-il pas ces abus avérés afin de conserver son statut de leader mondial et son image d’entreprise honnête ?
Sources :
-Anonyme (rédaction du site www.boursier.com), « Google accusé de « détourner le trafic » à son profit », mis en ligne le 11 janvier 2013, consulté le 18 janvier 2013 ; disponible sur http://www.boursier.com/actions/actualites/news/google-accuse-de-detourner-le-trafic-internet-a-son-profit-513792.html.
-Anonyme (rédaction de www.trader-finance.fr), «Google: accusé de “détourner le trafic” internet à son profit (Almunia) », mis en ligne le 11 janvier 2013, consulté le 16 janvier 2013, disponible sur http://bourse.trader-finance.fr/actualite/Google+accuse+de+detourner+le+trafic+internet+a+son+profit+Almunia++513792.html.
-Anonyme (rédaction de www.zdnet.fr), «Antitrust: la Commission européenne remet la pression sur Google. Et accuse», mis en ligne le 11 janvier 2013, consulté le 15 janvier 2013, disponible sur http://www.zdnet.fr/actualites/antitrust-la-commission-europeenne-remet-la-pression-sur-google-et-accuse-39786160.htm.
-Barker A. et Waters R., «Brussels takes tough stance on Google», mis en ligne le 10 janvier 2013, consulté le 20 janvier 2013, disponible sur http://www.ft.com/intl/cms/s/0/2b5bead6-5b3c-11e2-8d06-00144feab49a.html#axzz2JZb0pNIB.
-Bellamy A., « Concurrence : Google inquiété par la Commission européenne ? », mis en ligne le 13 janvier 2013, consulté le 21 janvier 2013, disponible sur http://www.lesnumeriques.com/concurrence-google-inquiete-par-commission-europeenne-n27862.html.
-L. Julien, « Bruxelles suspecte Google de détourner le trafic web vers ses services », mis en ligne le 11 janvier 2013, consulté le 19 janvier 2013, disponible sur http://www.numerama.com/magazine/24749-bruxelles-suspecte-google-de-detourner-le-trafic-web-vers-ses-services.html.
-Périnel Q., « Bruxelles soupçonne Google de «détournement de trafic», mis en ligne le 11 janvier 2013, consulté le 17 janvier 2013, disponible sur http://www.lefigaro.fr/societes/2013/01/11/20005-20130111ARTFIG00332-bruxelles-soupconne-google-de-detournement-de-trafic.php.