Mercredi 3 janvier, la Commission nationale informatique et libertés (CNIL) a condamné le géant américain Google à une amende d’un montant record de 150.000 euros. Il s’agit là du montant maximal de sanction pécuniaire que la CNIL peut infliger, sauf cas de récidive qui peut donner lieu à une sanction pécuniaire de 3000.000€. Dans une précédente procédure, la CNIL avait déjà condamné Google à une amende de 100.000€, ce qui était un record pour l’époque. Cette sanction pécuniaire s’accompagne d’une obligation de publier « un communiqué relatif à cette décision sur la page d’accueil de Google.fr sous 8 jours à compter de la notification » de cette décision, et ce pendant quarante-huit heures.
Les motifs de la sanction de la CNIL
Cette sanction fait suite à la fusion d’une soixantaine de règles de confidentialité de l’ensemble des services de Google en mars 2012, incluant notamment Gmail, Youtube, Google Maps, ou Drive en un seul document applicable à tous. La CNIL avait alors constitué un groupe de travail avec ses homologues européens pour identifier les conséquences de cette nouvelle charte sur la protection des données personnelles des internautes. Ils avaient abouti à la conclusion que Google violait la directive 95/4/CE et la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 modifiée. A la suite de plusieurs courriers, recommandation l’entreprise s’était engagée à mettre en œuvre de nouvelles mesures pour améliorer la protection des données des utilisateurs.
La condamnation de Google s’inscrit dans une action européenne où six autorités européennes de protection des données, membre du G29, ont lancé une à l’encontre de Google. Et surtout, elle fait suite à la mise en demeure par la CNIL de Google, le 10 juin 2013, de se conformer à la loi informatique et libertés sous un délais de trois mois.
« Sur le fond, la formation restreinte de la CNIL ne conteste pas la légitimité de l’objectif de simplification poursuivi par la société en fusionnant ses politiques de confidentialité .» Pour autant, la CNIL reproche à Google son comportement en matière de protection des données personnelles des internautes et constate l’absence de conformité de la nouvelle politique de confidentialité à la loi Informatique et liberté sur différents points :
- En premier lieu, les internautes ne sont pas suffisamment informés des conditions et des finalités de traitement des données.
- Ils ne sont pas en mesure d’exercer leurs droits, notamment d’accès, d’opposition ou d’effacement.
- De plus, Google ne respecte pas ses obligations en matière de consentement préalable des utilisateurs lors de la mise en place de cookies sur leurs terminaux.
- Et enfin, l’entreprise ne fixe pas la durée de conservation pour l’ensemble des données qu’elle traite au travers de ses services, comme la loi l’y oblige.
Google conteste la sanction de la CNIL
Le groupe américain conteste cette sanction de la CNIL. De son point de vue, ces lois ne sont pas applicable aux traitements des données en cause et la CNIL n’est pas compétente pour engager une procédure répressive. Le lundi 14 janvier, elle a donc saisi le Conseil d’État en déposant deux recours : un référé suspension et une procédure sur le fond. Le premier suspens la décision de la CNIL, et donc l’amende et la publication obligatoire. L’affaire sera ensuite réexaminée sur le fond. Le porte parole du groupe américain a indiqué que « nous nous sommes pleinement impliqués tout au long des échanges avec la CNIL afin d’expliquer notre politique de confidentialité et la façon dont elle nous permet de créer des services plus simples et plus efficaces. Nous faisons appel de sa décision »
La réaction de l’Europe
La vice-présidente de la Commission Européenne, Viviane Reding, voudrait une politique plus ferme et les amendes devraient correspondre à 2% des revenus annuels des entreprises ayant commis une infraction. Avec la proposition de Viviane Reding, cette amende aurait pu s’élever à 731 millions d’euros. Cette proposition vise à dessin le projet de règlement européen en matière de protection des données.
L’Espagne avait déjà condamné Google le 19 décembre dernier à une amende de 900 000 euros mais la France n’a sanctionné le géant du Web qu’à hauteur de 150 000 euros. Selon Viviane Reding, la sanction infligée par la France à Google ne représente que 0,0003% du chiffre d’affaires de l’année 2012 de Google. Elle craint notamment que le groupe ne se moque de la sanction qui lui a été infligée. S’il s’agit là de la sanction financière maximale qui peut être prononcé par la CNIL, cela n’équivaut qu’au chiffre d’affaire réalisé l’année dernière en deux minutes par le géant du net.
Bruxelles négocie avec Google depuis 4 ans. L’Europe demande au géant des propositions qui sont ensuite jugées par la Commission Européenne comme inacceptables. Un jeu de va-et-vient qui a assez duré selon Joaquin Almunia, commissaire à la concurrence. Qui indique que les faveurs accordées à Google seront les dernières, après quoi, des sanctions seront appliquées. Google ne dispose plus que de quelques semaines pour faire une proposition.
Des enquêtes sont toujours en cours à propos de la politique de confidentialité de Google dans plusieurs autres pays, tels que l’Italie, l’Allemagne ou encore l’Angleterre. Et c’est au plan européen que cette affaire devra être traité pour que les institutions de protection des données personnelles puissent tenter de rivaliser avec la société Google.
Sources :
- La formation restreinte de la CNIL prononce une amende une sanction pécuniaire de 150 000 € à l’encontre de la société GOOGLE Inc, CNIL, consulté le 8 janvier 2013, lien .
- Loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés modifiée, lien.
- Anonyme, « Vie privée : Google écope de l’amende maximale de la CNIL », Le Monde, consulté le 8 janvier 2013, lien.
- Anonyme, « Google fait appel de la décision de la Cnil devant le Conseil d’État », Les échos, consulté le 15 janvier 2013, lien.
- Anonyme, « Selon Bruxelles, l’amende infligée par la Cnil à Google n’est pas assez lourde », Zone-Numérique.com, consulté le 23 janvier 2013, lien.