Le 3 septembre 2019, Google France (GF) et Google Ireland Limited (GIF) ont signé une convention historique avec le parquet national financier de Paris. Les deux parties avaient engagé leurs négociations 2 ans auparavant.
- Google objet d’une (énième?) enquête pour fraude fiscale
C’est sans aucune surprise que la nouvelle d’une enquête sur Google pour fraude fiscale aggravé a été annoncée en 2015 par le Parquet national financier.
L’entreprise était accusée de ne pas avoir payé la totalité des impôts qui lui incombaient entre 2011 et 2016. Cinq années de fraude qui auraient permis à Google France d’économiser plus de 189 millions d’euros. Ce sont des montages fiscaux élaborés dans l’objectif de payer le moins d’impôts possible qui leur auraient permis de passer à travers les mailles du filet jusqu’alors. Rappelons d’ailleurs que leur siège social européen est basé en Irlande en raison du faible taux d’imposition sur les sociétés en vigueur ( soit 12,5% des bénéfices). Google, à l’image des autres GAFAM, essaie de jouer sur la notion d’établissement stable pour éviter de payer trop d’impôts dans les autres pays Européens (comme la France) qui ont une fiscalité beaucoup plus lourde. Par ailleurs, l’entreprise américaine n’en est pas à ses premières poursuites fiscales, puisqu’elle a déjà dû payer des sommes faramineuses à d’autres pays de l’UE comme le Royaume-Uni ou l’Italie dans des situations similaires.
- Du redressement fiscal à l’amende
Grâce à la loi relative à la lutte contre la fraude du 23 octobre 2018 (L. n° 2018-898, 23 oct. 2018, art. 41-1-2), la France a rendu possible le passage de la poursuite fiscale à la convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) lors d’une enquête ou d’une information judiciaire en cours. La CJIP existait depuis une loi du 9 décembre 2016 mais n’était ouverte qu’aux affaires de corruptions internationales et de blanchiment d’argent. Cet outil permet d’accélérer le processus de redressement fiscal et par la même occasion le paiement de grosses sommes dues par les entreprises. Jean-Baptiste Perrier, Professeur de droit à Aix-Marseille Université, explique que « L’idée du législateur était de transposer en droit français la procédure de deferred prosecution agreement américaine qui permet aux entreprises de conclure des accords avec les autorités américaines là où la justice française semblait impuissante à les poursuivre». Pour faire court, le fisc peut enfin négocier avec les multinationales. Ce qui intéresse Google en l’espèce, c’est de pouvoir signer un accord qui ne l’oblige pas à plaider coupable, ce qui ferait une mauvaise pub pour la société. Les deux parties trouvent leurs intérêts dans cette nouvelle solution judiciaire. C’est ce qui a permis l’aboutissement de la convention du 3 septembre après un travail de 2 ans entre les deux parties. Google avait ensuite 10 jours pour se rétracter, ce qu’elle n’a pas fait, validant ainsi la convention et le paiement de la somme convenue, à savoir 500 millions. Cette somme est partagée entre Google Irland Limited qui déboursera plus de 453 millions et Google France payera le reste. Ainsi, le litige entre le fisc et Google prend fin et toutes poursuites pour les faits évoqués dans l’accord cesseront.
- Le parquet national se félicite de son efficacité dans la lutte contre la fraude fiscale
Le procureur de la République financier ainsi que la Garde des sceaux et le ministre de l’action et des comptes publics vantent les mérites de cet accord. Pour le premier, c’est une victoire institutionnelle de la loi face à la fraude fiscale. Pour les seconds, c’est une victoire politique qui redonne à l’Etat français des armes pour faire face aux grandes entreprises. Il faut tout de même rappeler que c’est la 7ème convention en 2 ans d’existence des CJIP . Toutes les sommes obtenues par ces accords remplissent directement les caisses de l’Etat. Ce qui leur permet d’avoir une communication positive auprès du public. Toutefois nuançons le propos. Certains commentaires de ladite CIJP estiment que l’amende est encore trop faible comparée aux revenus mirobolants d’entreprises comme Google et ne serait pas assez incitative à faire respecter dans l’idée comme dans la forme la loi Française.
de Laget Lucie
Sources:
- Convention judiciaire d’intérêt public entre SARL Google France, Google Irlande Limited et le procureur de la république fiancer, PNF-15162000335 3 septembre 2019
- Communiqué de presse du procureur de la république financier
- Communiqué de presse de la garde des sceaux ministre de la justice et du ministre de l’action et des comptes publics
- MARRAUD DES GROTTES (G), Google : un accord historique à 500 millions d’euros, Actualité Lamy 12 SEPTEMBRE 2019 – actualité du droit.fr consulté le samedi 5 octobre 2019
- PERRIER (J-B), Amende de Google : une justice pénale négociée pragmatique, 30 Septembre 2019, Le club des juristes.fr, consulté le vendredi 4 octobre 2019