Les réseaux sociaux sont à présent incontournables, Ce sont les nouveaux moyens de communications et d’échange à travers le monde, les utilisateurs actifs des réseaux sociaux représentent 56,8% de la population mondiale soit 4,48 milliards d’habitants en 2021.
A l’ère du tout-numérique le quidam devient un « Homo-Numericus », chacun d’entre nous possède à présent une identité numérique, que ce soit par le biais de son profil Facebook, des photos que l’on poste sur Instagram ou sur notre CV en ligne disponible sur LinkedIn, notre présence sur la toile est indiscutable.
La tendance moqueuse relative aux “Boomers” démontre un clivage générationnel face à l’utilisation de l’internet, il est ainsi nécessaire de percevoir comment la jeunesse est aujourd’hui imprégnée plus que quiconque de l’usage d’internet et ainsi des réseaux sociaux.
De plus en plus jeune, de plus en plus tôt, des cours d’écoles au collège, des danses et des modes sont ancrées : Le phénomène Tik-Tok est partout et ne semble pas diminuer d’ampleur. La nouvelle vague Twitter surfe chaque jour sur de nouveaux problèmes et se présente comme la nouvelle Agora des temps moderne. D’illustres inconnus deviennent des stars du jour au lendemain, et sont affublés du titre prestigieux d’influenceurs, sous-entendant qu’ils inspirent ou endoctrinent leur public.
Le fait que la maison mère de Facebook et Instagram devienne META, et souhaite faire rentrer les réseaux sociaux au prisme du Metaverse, créant ainsi un nouvel univers numérique, n’est pas anodin. L’évolution n’a pas de limite et les réseaux sociaux sont le fer de lance de cette évolution.
Les récentes révélations face au scandale Facebook Initiées par Frances Haugen viennent ternir l’image d’Eldorado numérique et de liberté d’expression que veulent soutenir les réseaux sociaux, est-il alors possible d’observer ces réseaux sociaux sous le prisme d’un piège numérique ?
I. Le contexte d’actualité autour de Meta : Parangon d’une culture Numérico-toxique pour la jeunesse ?
L’entreprise de Mark Zuckerberg était récemment sous les feux des projecteurs, la lanceuse d’alerte Frances Haugen est venue souligner le fait que les intérêts économiques du groupe Meta se réalisent au détriment du consommateur de ce service, tout en ajoutant lors d’une audition au Congrès début octobre que l’utilisation de Facebook/Instagram à haute fréquence semble être fondatrice d’une addiction, notamment pour les plus jeunes. Si ce constat peut sembler simpliste, il est nécessaire de s’intéresser à la problématique liant réseaux sociaux et jeunesse.
Toutefois, avant de cibler le jeune public, une perspective du phénomène global qu’engendrent les réseaux sociaux est à analyser : peut-on considérer ces nouveaux moyens de communications comme vecteurs d’extrémismes de pensées ? La montée en puissance de phénomènes tels que le mouvement QANON doivent-ils modifier l’idée que l’on se fait des réseaux sociaux ?
Il est par ailleurs possible de parfaire cette pensée avec diverses enquêtes réalisées venant appuyer la mise en accusation des réseaux sociaux comme la métaphore de la nouvelle Pandore des temps modernes.
Une enquête réalisée par le Wall Street journal vient apposer le fait que « 32 % des jeunes filles ont déclaré qu’Instagram les faisait se sentir encore plus mal dans leur peau ».
L’élément plus délicat semble être le fait que ces constatations et chiffres proviennent de résultats d’enquêtes réalisées directement par Facebook.
Par ailleurs, l’arrêt soudain de la volonté de créer un Instagram pour les moins de 13 ans n’est pas anodin, face à de nombreuses critiques, notamment avec une lettre émise par les procureurs généraux de 44 États soutenant le fait d’un lien entre « la hausse de la détresse psychologique et des comportements suicidaires au sein de la jeunesse » et les réseaux sociaux, il était inconcevable de poursuivre cette idée première.
Ainsi, il est normal de s’interroger sur la place des réseaux sociaux dans la structure sociétale et de l’impact de ces derniers sur la jeunesse. Face à des constations claires d’un impact non négligeable, peut-on caractériser une mise en danger des utilisateurs par META comme l’amorce l’enquête initiée à l’encontre de l’entreprise par 11 États américains le 18 novembre 2021.
II. Un problème d’ampleur : La mise en danger des utilisateurs et notamment le public des mineurs.
C’est à ce propos que la procureure générale du Massachussetts, Laura Healey, qui est venue, dans un communiqué, énoncer cette volonté d’apposer à Meta la question de la responsabilité des réseaux sociaux vu précédemment.
Au-delà des responsabilités inhérentes au statut hybride d’éditeur/hébergeur des réseaux sociaux, on peut s’interroger sur l’atteinte qu’a éventuellement réalisé Facebook au prisme des lois de protection du consommateur, et notamment celles liées aux mineurs.
Si les réseaux sociaux sont interdits aux mineurs de 13 ans, on constate qu’en France près de 60% des 11-12 ans fréquentent un réseau social. Un des facteurs de ce chiffre important semble provenir du fait qu’à cet âge 87% des pré-adolescents de 8 à 13 ans détiennent un accès à la toile que ce soit par le biais d’un téléphone personnel ou d’un ordinateur.
Ainsi même si les réseaux sociaux sont interdits par la loi aux moins de 13 ans et que les mineurs de 13 à 15 ans doivent se soumettre à une autorisation parentale prévue par le RGPD pour la création d’un compte, il semble difficile d’appliquer ces mesures. La loi semble désuète sur l’impact des réseaux sociaux sur les plus jeunes, toutefois le manque d’encadrement de la part des réseaux sociaux en eux-mêmes face à cette ampleur est à souligner.
Il est ainsi nécessaire de prendre du recul face a cette mise en cause de META quant à la « normalité » de l’accès aux mineurs aux réseaux sociaux.
Au-delà de la personne que nous sommes, chacun d’entre nous possède sur internet une identité numérique, vecteur d’une e-réputation relative à chacun. Peut-on réellement imaginer qu’un enfant de moins de 13 ans ait conscience de l’impact de chacune de ses publications ou actions dans l’univers des réseaux sociaux ?
Par ailleurs, à la question de savoir si le mineur a conscience de la pluralité d’informations qu’il reçoit et si son esprit critique est déjà assez aiguisé, la réponse semble évidemment négative.
Frances Haugen soutient l’idée d’un droit à l’oubli sur les contenus des mineurs dans les réseaux sociaux à leur majorité, peut-on considérer cela comme une tentative de solution face à une problématique globale ?
On peut ainsi se demander quelles conséquences tirer de ce rapide état des lieux des réseaux sociaux actuellement. Tout en notant que ces derniers font partie intégrante de notre universalité numérique et fondent en partie l’état de la société aujourd’hui.
III. Quelles solutions envisager ? Une éducation numérique ou un contrôle strict de l’accès aux réseaux sociaux ?
Aujourd’hui, dans le monde sur-connecté qui a été présenté, il est important de se demander comment pallier ces problématiques inhérentes à tous.
Est-il possible d’instaurer une éducation numérique afin de prévenir les plus jeunes sur les éventuels dangers d’internet et des réseaux sociaux ?
Il est à ce propos intéressant de faire référence à un décret récent limitant l’accès aux sites pornographiques aux seules personnes démontrant leur majorité, venant alors ajouter une protection aux mineurs. Doit-on réaliser une campagne similaire afin de préserver les mineurs de l’accès aux réseaux sociaux ? Si ce choix est envisagé n’ira-t-on pas trop loin dans la diabolisation de ces sphères sociétales ?
Par ailleurs, au-delà de notre prisme occidental, on peut observer le fait que la question des réseaux sociaux et de l’enfance a été traité au sein de l’empire du milieu, la Chine venant limiter l’utilisation de Tik-Tok a une durée de 40 minutes par jour pour les enfants de moins de 14 ans, peut-on considérer cette solution comme juste ou privative de liberté ? et comment pourrait-on mettre en place ce genre de mesure en France si celle-ci s’avère justifiée ?
Toutes ces questions et interrogations face à l’appréhension des réseaux sociaux et de leur impact dans la société et notamment chez les plus jeunes sont à prendre en compte rapidement et nécessitent d’être traitées et discutées. Cette actualité démontre une prise de conscience de l’impact de ces sphères de communication, il est d’autant plus important de les traiter pour demain, avec l’approche que souhaite donner Mark Zuckerberg à ces dernières au prisme du Metaverse.
Sources :
- (1) “Chiffres réseaux sociaux 2021” rédigé par Thomas Coëffé mis à jour le 4 août 2021, BDM.
- (2) “En pleine tourmente, Facebook change de nom pour devenir META” rédigé par franceinfo avec AFP le 28 octobre 2021, franceinfo.
- (3) “Les révélations de Frances Haugen sur Facebook changeront-elles le réseau social ?” rédigé par Anne Cagan le 05 octobre 2021, Numérama.
- (4) “Une lanceuse d’alerte exhorte le Congrès a mieux régulier Facebook” rédigé le 05 octobre 2021, France 24.
- (5) “Etats-Unis: qu’est-ce que le mouvement QAnon qui contamine l’Amérique” rédigé par Venantia Petillault le 16 octobre 2021, RTL.
- (6) “Instagram a conscience d’être nocif pour une jeune fille sur trois” rédigé par Aurore Gayte le 15 septembre 2021, Numérama.
- (7) “Facebook abandonne son projet d’Instagram pour les moins de 13 ans” rédigé le 27 septembre 2021, Ladepeche.
- (8) “Instagram accusé d’être un “vrai problème pour la santé mentale” des enfants : une enquête est lancé aux USA” rédigé par Aurore Gayte le 19 novembre 2021, Numérama.
- (9) CNIL : RGPD – Chapitre 3 article 17 : Droit à l’effacement.
- (10) “Réseaux sociaux : Que dit la loi ?” rédigé le 24 mars 2021 par Martine Otter, espaces-numériques.
- (11) “Loi et réglementation des réseaux sociaux” e-enfance.
- (12) “Les moins de 13 ans sur les réseaux sociaux” rédigé le 20 novembre 2021, Ohtasri
- (13) “E-reputation et identité numérique” par Géraldine Creusot, professeur creusot.
- (14) “Frances Haugen plaide pour un droit à l’oubli pour les contenus des mineurs sur les réseaux sociaux à leur majorité”, Le Figaro.
- (15) “Un décret autorise le CSA à bloquer les sites pornos en France”, rédigé le 8 octobre 2021, l’Union.
- (16) “La Chine limite le temps d’utilisation de TikTok à 40 minutes par jour chez les moins de 14 ans” rédigé par Nicolas Six, le 20 septembre 2021, Le Monde.