Nous sommes actuellement témoins d’un tournant, l’imprimante 3D est en passe de changer radicalement nos modes de vie. En pratique une imprimante 3D consiste à reproduire des objets couche par couche grâce à un matériau (plastique, bois, chocolat…) qui vient remplacer le papier d’une imprimante traditionnelle. Si l’idée d’une impression tridimensionnelle avait déjà germé dans la tête des chercheurs depuis longtemps, il a fallu attendre des années avant d’arriver à des résultats concluants. En effet, ces derniers mois l’impression tridimensionnelle n’a de cesse de démontrer dans divers secteurs son extraordinaire potentiel. Les possibilités d’impression en 3D ne cesse d’être repoussées ; vitesse d’impression plus rapide, machines de moins en moins onéreuses et envahissantes, possibilités d’impressions de plus en plus complexes…

Ainsi, comme toute avancée majeure elle divise, entraînant dans son sillage inquiétudes et d’espérances pour l’avenir.

Un prix de plus en plus abordable

En effet ce n’est plus de la science fiction, l’imprimante 3D n’est plus l’apanage des laboratoires de haute-technologie. Depuis quelques temps l’impression 3D est en passe de se démocratiser. La raison ? Un matériel de plus en plus abordable pour monsieur tout le monde, à l’image de la «3D Idea Builder » l’imprimante 3D de chez Dremel, vendue à moins de 1000 $. Si à ce prix les possibilités d’impression restent encore limitées on peut aisément imaginer dans un futur proche un prix en baisse pour des performances en hausses.  Cependant, il est désormais possible de tester l’impression 3D sans se ruiner. En effet, la Poste propose depuis peu dans quelques-unes de ses agences  un service d’impression 3D. Cette expérience semble être une bonne solution à court terme afin de permettre aux gens de se familiariser avec cette nouvelle technologie.

Evidemment, face à cette démocratisation galopante des réserves sont émises.

La crainte d’une explosion de la contrefaçon

Les possibilités de cette nouvelle technologie soulèvent évidemment des questions en matière de propriété intellectuelle. Idéalement un individu achètera en ligne un fichier lui permettant d’imprimer l’objet voulu à domicile mais qu’arrivera-t-il lorsque l’individu choisira de se passer d’intermédiaire ? En effet, couplé avec l’utilisation du scanner 3D qui pourra faciliter une « numérisation sauvage » des objets, on peut aisément penser à des fichiers objets qui seront partagés librement et illégalement. C’est pour cette raison que Monsieur le député François Cornut-Gentille a voulu attirer l’attention de la Garde des Sceaux mentionnant, « des objets industriels qui vont à court terme devenir des objets téléchargeables (…) pour lesquels le droit existant n’apporte pas de réponse ». Par ailleurs, il existe également une crainte autour de l’exception de copie-privée, l’article L.122-5 al 2 du Code de la Propriété Intellectuelle permet à toute personne de reproduire une œuvre protégée par le droit d’auteur, sans autorisation tant que la reproduction est réservée à un usage privé. Cependant depuis 2011, cette exception est uniquement valable si la source est licite. Ainsi il existe déjà des armes juridiques afin de faire face à cette utilisation frauduleuse du scanner 3D qui pourrait rendre n’importe quelles œuvres téléchargeables puis imprimables. Reste donc à étendre cette exigence de légalité aux objets industriels.

En outre, associé à la problématique du droit de la propriété intellectuelle se pose également le problème de savoir ce qui est imprimé.

Un fusil d’assaut à domicile

Ceci n’est pas de la science fiction. Cody Wilson un jeune américain de 26 ans a inventé une imprimante 3D permettant de reproduire à domicile des armes à feu, une première version permettant la création d’un pistolet et récemment une seconde version permettant la création d’un fusil d’assaut. Le danger de ces armes à feu au-delà de leur finalité mortelle est qu’elles sont intraçables, fabrication maison oblige. L’impression 3D pose ainsi le problème de la prolifération mondiale des armes à feu. Ainsi dans un futur dystopique et déjà proche chacun aura la possibilité d’avoir une arme en deux clics.

Cependant, il serait regrettable de n’entrevoir que le côté sombre des nombreuses possibilités qu’offre l’impression tridimensionnelle.

Un nouvel espoir

L’impression 3D a déjà fait des miracles en médecine. En effet, au Pays-Bas un crâne à été reproduit en 3D avant d’être implanté à une patiente. Cet été, en Chine une vertèbre a été imprimée en 3D avant d’être implantée à un enfant. L’impression 3D semble sans limite,  au point que des chercheurs étrangers expérimentent en ce moment la possibilité de se servir de cellules souches comme matériau imprimable. Ainsi, il serait possible dans l’avenir de penser à l’impression d’organes humains. Cependant, la recherche sur les cellules souches est interdite en France depuis les lois de bioéthiques de 1994, mais exceptionnellement possible depuis 2004 dans des cas « susceptibles de permettre des progrès thérapeutiques majeurs ».  Fort à parier que les avancées de l’impression 3D relanceront le débat.

L’imprimante 3D connaît aussi sont utilité dans le domaine de l’aérospatiale. Le 21 septembre dernier, les Etats-Unis ont envoyés la première imprimante 3D dans l’espace. A court terme cette imprimante sera utile afin de remplacer des pièces défaillantes évitant ainsi des dépenses faramineuses en logistique. A long terme la NASA pense aussi à la possibilité d’imprimer de la nourriture, ce qui serait un élément déterminant dans la conquête spatiale. Une expérimentation qui pourrait avoir plus largement d’immenses répercutions sur un problème majeur mais beaucoup plus terre à terre, celui de la faim dans le monde.

Ainsi l’impression 3D devrait très rapidement venir bouleverser le droit, l’économie, la science et  plus largement notre quotidien.

Sources :

–  BOSREDON (M.), « Bordeaux: Une imprimante 3D grand public à La Poste de Mériadeck », 20minutes.fr, mise en ligne le 23 septembre 2014. <http://www.20minutes.fr/bordeaux/1448359-20140923-bordeaux-imprimante-3d-grand-public-poste-meriadeck>

–  ANONYME, « Etats-Unis : l’imprimante 3D qui permet de faire son fusil d’assaut chez soi », RTL.fr, mise en ligne le 2 octobre 2014. <http://www.rtl.fr/actu/international/etats-unis-l-imprimante-3d-qui-permet-de-faire-son-fusil-d-assault-chez-soi-7774619873>

– COURTOIS (G.), « Pourquoi l’impression 3D va bouleverser la propriété industrielle », Lesechos.fr, mise en ligne le 11 février 2014, <http://www.lesechos.fr/idees-debats/sciences-prospective/0203272629756-pourquoi-l-impression-3d-va-bouleverser-la-propriete-industrielle-649451.php>

– HERCHKOVITCH (J.), « Impression 3D : une vertèbre a été implantée chez un jeune Chinois », Lefigaro.fr, mise en ligne le 25 août 2014,  <http://sante.lefigaro.fr/actualite/2014/08/25/22717-impression-3d-vertebre-ete-implantee-chez-jeune-chinois>

– GANNON (M.), « SpaceX Launches Dragon Cargo Ship for NASA in ‘Fantastic’ Night Flight », Space.com, mise en ligne le 21 septembre 2014, <http://www.space.com/27215-spacex-dragon-cargo-ship-launch.html>